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Travail d’Atelier

DOUZE HEURES DE JOUR
Œuvres récentes — Léo Lefort
Chapelle Saint Lazare, Angers
du 8 au 18 octobre 2021

Toute conversation autour du travail de Léo Lefort ne saurait être totalement pertinente tant qu’il n’est pas fait mention de son intense parcours de vie, des circonstances qui influencent sa façon de vivre le monde et de la manière dont il déploie ses préoccupations dans ses œuvres.

En effet, les années d’enfance de Léo, inscrites dans son village natal des bords de Loire à la fin des années soixante dix contrastent fortement avec ses années d’adolescence dans les villes d’Angers et de Rennes, où il a étudié les beaux-arts. En résidence au Domaine de Kerguéhennec, il découvre des artistes contemporains tels que Per Kirkeby, Mario Merz, Pier Paolo Calzolari, Lucio Fontana, Adrian Schiess, Franz West, Ricardo Brey, Louise Bourgeois, Malachi Farrell, François Bouillon et Xavier Noiret-Thomé pour n’en citer que quelques uns.

Après avoir travaillé deux ans au Service Culturel de l’Ambassade de France en Éthiopie et avoir vécu certains des événements les plus importants de sa vie à Addis-Abeba, il est nommé lecteur en esthétique & histoire de l’art à l’École des Beaux-Arts et du Design de l’Université d’Addis-Abeba. Ainsi plongé au cœur d’une école où enseignent les peintres et sculpteurs Mezgebu Tessema, Tadesse Mesfin, Bekele Mekonnen, Bisrat Shibabaw, eux-même formés dans les prestigieuses Repin & Surikov Academy de Moscou et Saint Petersbourg, Léo se confronte, entre autres choses, aux enjeux picturaux portés par les dynamiques d’un Réalisme Socialiste encore fort prégnant. Seize années durant, Léo poursuivra ses collaborations artistiques avec les peintres de la nouvelle génération Behailu Bezabih, Mulugeta Tafesse, Tewodros Hagos, Nebiat Abebe, Yohannes Gedamu, Aïda Muluneh, Tamrat Gezahagne, Merid Tafesse et nombreux autres. Au terme de ce séjour haletant, il s’installe quatre ans sur les rives du Golfe Persique puis à Londres.

Cette complexité d’influences a un impact direct et durable sur sa production actuelle. L’étude de l’iconographie orthodoxe éthiopienne omniprésente sur les sites religieux et historiques qu’il a longuement arpentés —Royaume d’Aksum, églises rupestres de Lalibela, Gondar…— en contrepoint de laquelle s’inscrivent la proximité avec les peintures de propagande des années de la Terreur Rouge éthiopienne et celles issues des écoles expressionnistes et abstraites du Berlin, Paris et Anvers des années 60 aux années 90, tout cela crée un terreau dans lequel la pensée picturale de Léo a trouvé sa nature. Les toiles se construisent à partir de ce maelström d’images, de références sacrées et profanes, de narrations emplies de connotations iconographiques familières, mythologiques, attendues et incongrues.

Art de la combinaison de différentes techniques (dorure et peinture à l’huile), Léo expose le lin brut de ses grands châssis aux aplats de cuivre, de pigments —zinc, cobalt, ocre, noir de vigne—, qu’il applique de manière traditionnelle. Son travail est le résultat de recherches approfondies sur des gestes simples et compositions minimalistes. Une pensée intime, un paysage mental vivant, un rapport organique au monde et quelqu’obsolètes objets disséminés servent de sources d’inspiration à ce nouveau déploiement chromatique. Émergent ainsi de nouvelles possibilités et foisonnent les questions.

En peignant, Léo s’intéresse de plus en plus à l’idée que sa peinture peut être un geste militant. Cette peinture – en tant que processus informé, intuitif, représentatif également d’un état d’esprit inscrit dans le présent, nourrit par le passé – propose de nouvelles conversations.

Présentée sous le titre “DOUZE HEURES DE JOUR”, cette série de grands formats, auxquels s’adjoignent des éditions, cherchera son point d’équilibre sur les cimaises de la nef de la chapelle Saint Lazare.

Vous serez invités à vous entretenir avec ces images glissantes sous la lumière déposées.

Laure Neuchatie, février 2021.